par Nassera Metmati

Faust au XXIème siècle. Le Faust Historique semble avoir souhaité devenir un savant reconnu de l’Université et intégré au mouvement des humanistes en même temps qu’un magicien qui puise ses sources de connaissance dans les savoirs et des pratiques que refusait l’institution. Georg Faustus, Magister Georg Sabellicus, (Doktor) Johann Faust, sont les homonymes du même hérétique mort dans des circonstances mystérieuses et horribles, qui nourrissent les fables populaires. Le Faust Mythologique s’y empare ; auquel la poésie (Goethe), l’art (Eugène Delacroix), la philosophie (Carl Jung), et le cinéma (Sokourov) répond dans un réel imaginaire.

Alexandre, le grand…Alexandre Sokourov, cinéaste russe vient d’achever un Faust. Le réalisateur du Deuxième Cercle achève sa tétralogie des grandes figures mystiques après Lénine, Hitler et Hiroïto. Le cinéaste espère que le tout aura la forme d’un cercle où les personnages pourront se répondre, dans une réflexion très précise sur ce qu’est l’essence d’une âme, idée essentielle dans le cinéma de Sokourov. Fidèle à sa méthode, quelque peu inversée néanmoins puisque Faust est un personnage mythologique, Sokourov s’est attelé à imaginer la figure humaine, le parcours, la vie du savant. Dans une interview réalisée sur France Culture en mars dernier, A. Sokourov y expliquait les raisons et les fondements de ce prélude faustien ; le propos : « L’essentiel est de trouver une position moyenne à l’intérieur de soi-même », comme son personnage. Selon lui, la création aide à la compréhension du mauvais et de l’être criminel. La question est : « Où la destruction a-t-elle commencée ? ». Le peuple et Dieu sont les seuls juges. Alexander Sokourov s’interdit d’être un juge auteur.

Faust pactise avec le diable pour sauver le peuple de la peste, répandue par Méphisto, et ‘autorisée’ par le Seigneur pour tester la « beauté de l’âme » selon les propos de Sokourov, l’alchimiste trop sage pour céder au Mal. Comme le fil fantasmatique du thème faustien, le Faust de Sokourov, à l’écart des règles, pourrait coller à sa forme onirique, d’une approche poétique et musicale de cette œuvre, appuyé par un montage subjectif créant une forme très appuyée ou Murnau – auquel Tousmescinemas consacre une émission spéciale – privilégiait dans les années 1920 un puissant sens de l’expression plastique propre à une transcendance du mélodrame imposé par la réserve ourdie par le première signataire de l’éternel mythe faustien.