par Nassera Metmati

Morty S.Tasman (Jerry Lewis) est embauché par la direction d’un grand studio d’Hollywood dans le but d’y espionner ces salariés.

Jerry Lewis se lâche. Encore un épisode inédit du nouvel album de Jerry Lewis. Jerry Lewis entre dans la cour des grands. Jerry Lewis au cinéma. Jerry Lewis, l’espion secret. Autant de titres que pourraient sortir une roulette à presse à 100 000 exemplaires pour annoncer l’aventure de Jerry Lewis, qui passe du coq à l’âne sans jamais se faire prendre pour une poule mouillée. Jerry Lewis (Morty S. Tasman) dégouline de neunieurie dans tous les genres que lui offre les plateaux de cinéma : western, comédie, romance. La théorie selon laquelle Jerry serait un personnage crée dans l’unique but de briser la foutaiserie qu’annonce un mot dépassé, cinéma, prend son sens dans le Zinzin. Partout où Morty passe, le septième art trépasse. Il est normal, dés lors, d’envisager le film comme une suite de mauvaises séquences, toutes les plus abruties et incohérentes. Voyez une première parade dans laquelle Morty est pris au piège lors d’un tournage musical, où il brise le numéro de vocalise d’une danseuse dans une envolée criarde, irréelle. Voyez une séquence où il enregistre cette même voix pour doubler un film à l’eau de rose d’une actrice à deux francs six sous, ce qui rend furieux son réalisateur anéanti par un tel désastre public. Derrière le paravent des belles robes, d’un beau décor, de belles figures, surgit tous les trucages et ingéniosités techniques pour faire passer du laid, à l’inutile au prétendu beau. Qui donc aime Jerry Lewis devrait se poser la question qu’il aime un personnage qui mépriserait ce cinéma.

Le Zinzin est un affabulateur, une marionnette produit par le ridicule de l’ensemble d’une industrie cinématographique qui n’est qu’un artifice. Le cinéma est déjà une industrie quand d’autres se posent encore la question, aujourd’hui, de critiquer cette industrie. Ces personnes devraient s’interroger plutôt sur la valeur véridique qu’induit cette industrie au lieu de consommer la leur qui n’est que critique vide, coquille sans sens qui sert moins au cinéma qu’aux bavardages, aux étalages de frustrations personnelles aux grand jours, à un catharsis complexé de café enfumés déconnectés de la réalité d’un système qui existe. Pour faire ressortir cet état, il faudrait donc remercier Jerry Lewis, qui ne fait que son banal métier d’acteur. Jerry (Morty) joue au bon employé ; Jerry s’occupe du courrier et des colis, il délivre les scripts aux secrétaires de rédactions. De temps à autre, Jerry pète un plomb comme tout employé modèle ; il se mue en chef ingrat et se frotte aux réprimandes hiérarchiques. Jerry en fait des tonnes à l’image de tous ces personnages d’un second life cloitrée à la Paramutual. Jerry est emprisonné. Le décalage résonne au cours d’une scène de déjeuner épique dans les allés paisibles de l’immense studio. Morty (Jerry) se retrouve pris au piège d’un film de guerre, où bombes éclatent et soldats s’écharpent en quelques fractions de secondes. Jerry illustre un bazar ambiant, amusant à regarder, pourtant dézingué par un de ces plus flamboyants illustrateurs. Décidément, Jerry banquable ne sera jamais un titre pour le Jerry Lewis.

Fiche technique Réalisé par Jerry Lewis
Titre original: The Errand Boy Avec: Jerry Lewis, Brian Donlevy, Howard Mc Near Genre: comédie Nationalité : américaine Durée : 132 mns Année de production : 1961

———————————————————————————————————————

Extrait : Partie 1